Camille Fallet a commencé par documenter les paysages de l’Aveyron, où il a grandi, et poursuit une série sur les Molènes, hautes plantes qu’on trouve presque partout dans le monde, disséminées par le vent et les automobiles. À la manière d’un enquêteur, Camille Fallet relève à chaque fois dans un environnement donné des éléments potentiellement significatifs. Sa recherche est aussi celle d’images antérieures, liées à un imaginaire personnel. Dans cette mémoire visuelle associative, la notion de découpage, au double sens d’extraction et de séquence, tient une place essentielle. Elle constitue le lien entre les bandes dessinées, les films fantastiques et les livres d’artistes utilisant la photographie à travers lesquels son regard s’est formé.
Pour l’exercer, Camille Fallet a choisi un « sujet » commun, à la fois bien défini et en expansion. À Londres, à Glasgow, dans le périmètre du Grand Paris ou de la communauté d’agglomération de Bordeaux, son travail s’est concentré sur l’architecture « moderne », les espaces intermédiaires et les circulations multiples qui constituent les territoires urbanisés. Il tient, d’une part, de l’enregistrement en séries : répertorier des typologies, traiter un ensemble sous différents aspects. Il procède, d’autre part, d’un mouvement d’approche, généralement depuis la périphérie, où apparaissent détails et points de vue inattendus. Les photographies font ensuite l’objet d’un montage — assemblage dans l’espace, projection, mise en page. Ces formes réactivent souvent des modèles photographiques ou des œuvres d’artistes reconnus.
Chez Camille Fallet, il ne s’agit pas d’une attitude postmoderne (il n’y a ni vérité ni original, uniquement simulacre et copie), mais de la possibilité d’exercer son propre regard en s’appropriant une histoire et, pourquoi pas, en la réinventant. Entre reprise et déplacement, ses images ouvrent alors à une compréhension critique de l’urbanisation actuelle et peuvent informer des actions visant à la transformer.
David Benassayag