DEUX bis Déplacer l'horizon
Le collectif DEUX bis, initié par Pauliina Salminen et Driss Aroussi, propose depuis 2016 une programmation autour de la photographie et de la vidéo qui privilégie les collaborations artistiques. Retour sur le projet Déplacer l’horizon dont l’exposition au Centre Photographique Marseille a clôturé cet échange nord-sud autour d’une thématique propice à l’évasion.
Propos recueillis par Christophe Asso
Pouvez-vous présenter le collectif DEUX bis ?
DEUX bis est un projet de programmation et de collaboration artistique porté par l’association Image Clé depuis 2016. Ce travail collectif a démarré autour d’un espace d’exposition situé à 2 rue de la Bibliothèque à Marseille et continue depuis 2018 en collaboration avec la galerie Art-Cade. Un collectif d’artistes contemporains s’est formé autour d’expositions et de projections d’art contemporain, notamment la photographie et la vidéo. Nous travaillons à la programmation de la Vitrine d’Art-Cade galerie des grands bains douches de la Plaine (actuellement en travaux) et aussi hors les murs par des événements éphémères dans la rue et/ou des installations in situ dans d’autres lieux. Pendant ces années d’ouvertures, la galerie Deux s’est révélée pour nous un lieu d’expérimentation où nous avons programmé de nombreuses expositions avec des artistes plasticien.ne.s venant de différents pays. Pauliina et Driss sont présents depuis le début. À cette période Alexis Demoulin avait en charge la médiation des expositions par l’association Image Clé. Fleur (Fleur Descaillot) a rejoint le collectif en 2018.
Aujourd’hui nous poursuivons le même désir d’ouvrir des espaces de monstration pour les artistes dont nous sélectionnons les projets artistiques. Chaque membre du collectif est bénévole et notre fonctionnement est libre. Nous avons une programmation d’artistes que nous proposons et mettons en place à partir de nos découvertes, celle-ci est plutôt tournée vers la photographie et la vidéo, sur une réflexion entre image fixe et animée. Nous travaillons en collaboration avec les artistes exposé.e.s pour la diffusion, la communication, l’organisation, la scénographie. L’association Image Clé porte les projets et met à disposition du matériel, mais nous n’avons pas d’aide budgétaire pour les d’expositions. Nous mettons en place des solutions pour permettre aux artistes d’exposer et nous travaillons principalement dans une économie de moyens, dans le principe d’expérimentation collective.
Pour le projet Déplacer l’horizon nous avons eu l’ambition de créer des rencontres entre artistes et des expositions avec plus de moyens. Nous avons demandé et reçu un soutien financier par l’institut Français, la Ville de Marseille mais aussi la Région (Dans le cadre de Manifesta 13 mais aussi avec la Carte Blanche aux artistes) ce qui nous a permis de faire venir à marseille les artistes finlandais et marocains pour un temps d’échange professionnel, de financer les déplacements des artistes en Finlande et au Maroc, ainsi que la production, le transport des œuvres et les éditions des catalogues pour les expositions.
Comment est né le projet Déplacer l’horizon ? Quelles sont les origines de la collaboration avec le Maroc et la Finlande ?
Le projet Déplacer l’horizon est né d’une réflexion commune entre Pauliina et Driss. Il s’agissait, à partir des leurs attaches en Finlande et au Maroc, d’élargir le réseau existant et d’ouvrir des échanges entre le nord et le sud sur une thématique commune : Déplacer l’horizon. Fleur D, membre active du collectif, a été invitée à mener le projet avec Pauliina et Driss. L’idée étant d’ouvrir des questions liées à nos propres pratiques artistiques et réflexions personnelles : qu’est ce que signifie déplacer l’horizon ? Quelle vision, quel questionnement peut faire émerger cette thématique ? Mais aussi des questions liées aux déplacements des artistes et à la monstration, comment les œuvres circulent aujourd’hui, qu’est ce que la mobilité des artistes, comment se déplacer aujourd’hui.
En plus de nos créations et des échanges sur la thématique, nous nous sommes tous les trois, investis dans différents domaines pour mener le projet : de la conception de dossier de demandes de subvention, à la création visuelle, communication et diffusion en ligne, en passant par la régie des oeuvres pendant les temps d’expositions et la médiation. Nous nous sommes relayés tout au long des deux ans pour que le projet se développe, puisse être diffusé et montré dans les 3 pays.
Comment s’est effectuée la sélection des artistes ?
La sélection s’est effectuée à l’étranger avec deux galeries d’art contemporain : Le Cube independent Art Room à Rabat et MUU Galleria à Helsinki. Grâce à ces échanges professionnels avec ces galeries qui ont accueilli le projet, nous avons pu découvrir le travail de plusieurs artistes et nous avons fait une sélection commune.
Chacun des artistes sélectionnés (Driss Aroussi, Fleur D, Khadija El Abyad, Marko Lampisuo, Mohammed Laouli, Marjo Levlin, Sari Palosaari, Pauliina Salminen, Fatimazohra Serri) a été amené à participer au projet de manière libre selon sa sensibilité, ses préoccupations artistiques et ses questionnements. Le commissariat pour chaque exposition est un commissariat de groupe, que nous avons mené tous et toutes en collaboration, par des échanges en ligne sur le contenu des œuvres et sur place avec des temps de travail commun en amont des expositions. L’aspect numérique de nos échanges a pris une toute nouvelle dimension suite à la situation du Covid-19 et nous a permis de continuer à échanger et à concevoir l’exposition ensemble, malgré l’impossibilité des déplacements.
Tout au long des deux années le projet a été montré dans les trois villes reliées au projet Helsinki, Rabat et Marseille par des expositions et des soirées projections, notamment avec des rencontres avec les artistes.
Nous avons ainsi eu des temps d’exposition d’un mois en 2019, en novembre à l’Institut Français d’Helsinki et en décembre à la médiathèque de l’Institut Français de Rabat, mais aussi des temps de rencontres “Artist Talk” et des soirées projections dans les deux lieux partenaires du projet : Le Cube independant Art Room à Rabat et à la Galerie MUU à Helsinki. L’exposition récente du projet Déplacer l’horizon au Centre Photographique Marseille du 05 février au 28 février 2021 a clôturé ce cycle de monstration dans les 3 villes. Le projet a en plus été accueilli par des structures Marseillaises qui nous ont donné la possibilité de montrer l’évolution du projet tout au long des deux années. La galerie Art-Cade nous a ouvert ses portes pour le lancement du projet en Juin 2019, avec un weekend de rencontre avec le public. Avec la galerie Zoème nous avons organisé à plusieurs reprises des temps de projections et des rencontres avec le public, ils nous ont également ouverts leurs espaces de travail pour que l’on puisse organiser des rencontres professionnelles avec tous les artistes impliqué.e.s dans le projet. Enfin la galerie Dos Mares qui nous a ouvert son espace atelier pour un temps de monstration.
D’où vient l’idée du cadavre exquis ?
L’idée du cadavre exquis est venue assez spontanément, en s’interrogeant sur comment mener un travail collectif à distance, comment partager des points de vue multiples sur une thématique commune. Il est relativement aisé aujourd’hui de communiquer, d’échanger, de partager et d’élaborer finalement une correspondance multimédia. Nous nous sommes saisis des possibilités qui s’offraient à nous par le numérique. L’idée d’un échange de mail dans une forme libre, à investir et à s’approprier par chacun des artistes, a émergé. Nous avions dès le début émis l’hypothèse d’en faire une publication, il nous semblait important que ces échanges soient vus en parallèle de la production des œuvres créées. L’idée étant que le cadavre est finalement à voir dans son ensemble, comme la construction d’une pensée en mouvement et commune, où chacun inter-réagit et partage ce qui le traverse.
Quels sont vos projets ?
Nous réfléchissons à un projet de nouveau collectif d’envergure cette fois-ci plutôt régional en lien avec des structures présentes à Marseille. Le projet est en cours d’élaboration et nous espérons qu’il soit présenté dans le courant 2022. Nous ne pouvons en dire plus à ce stade… Il réunira des artistes marseillais aux pratiques différentes autour d’un nouveau questionnement, d’un fil conducteur commun.